• Extraits des Contes Populaires de Basse Bretagne

     
     (SUITE)


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    Selaouit, mar hoc’h eus c’hoant,
    Hag e clevfot eur gaozic coant,
    Ha na eus en-hi netra gaou,
    Met, marteze, eur gir pe daou.

    Écoutez, si vous voulez,
    Et vous entendrez un joli conte,
    Dans lequel il n’y a pas de mensonges,
    Si ce n’est, peut-être, un mot ou deux.

     

    Riwall alla trouver le roi et lui fit part des conditions auxquelles il lui était possible de réussir.

    Le roi lui accorda ce qu’il demanda.

    Quand tout fut prêt, il se mit en route avec son cheval.

    Ils vont, ils vont, toujours devant eux, tant et si bien qu’ils finissent par arriver sous les murs du château du Cheval du Monde.

     La porte était ouverte.
    — « Montez sur le mur, » dit le cheval à Riwall, « par ce chêne qui est tout contre, et de là vous verrez beau jeu, tout à l’heure. »

    Riwall monta sur le mur et son cheval entra dans la cour.

    Le Cheval du Monde vint aussitôt à sa rencontre, en hennissant et la queue en l’air.

    Quel cheval !…
    Le combat commença sur-le-champ.

    Le Cheval du Monde lança au cheval de Riwall une ruade qui détacha des flancs de celui-ci trois peaux de bœufs, lesquelles tombèrent à terre.

    Le combat continua et devint bientôt furieux, au point que le château et la terre en tremblaient.

    Les coups du Cheval du Monde étaient terribles, et, à chaque ruade, il détachait deux ou trois peaux de bœufs des flancs de l’autre ; mais celui-ci ripostait aussi vigoureusement avec ses fers de cinq cents livres, et, à chaque ruade, il enlevait à son ennemi un lambeau de chair saignante.

    Le combat dura trois heures entières, et Riwall, qui y assistait, du haut du mur, et en suivait les péripéties avec anxiété, trembla plus d’une fois pour la vie de son cheval.

    Il ne restait plus à celui-ci que quatre ou cinq peaux autour du corps, lorsque le Cheval du Monde tomba tout à coup à terre, les quatre fers en l’air, épuisé et demandant quartier.

    Aussitôt, Riwall descendit du mur et passa une bride à la tête du vaincu, qui se laissa faire et le suivit, tout triste et docile comme un mouton.

    Quand ils arrivèrent tous les trois à Rennes, tout le peuple et la Cour accoururent au-devant d’eux. Jamais on n’avait vu deux chevaux pareils.

    Le roi accueillit Riwall avec force compliments et l’invita à dîner, à sa table, tant sa joie était grande de posséder dans ses écuries une merveille comme le Cheval du Monde.

    Mais la princesse sorcière, qui ne voulait aucun bien à Riwall, sans doute parce qu’elle trouvait qu’il ne faisait pas assez attention à elle, dit encore au roi, quelques jours après :
    — « Si vous saviez, mon père, ce dont s’est vanté l’homme au grand cheval !… »
    — « De quoi donc s’est-il vanté ? demanda le roi. »
    — « Il s’est vanté de pouvoir vous amener à votre cour la princesse qui est retenue captive par un serpent, dans son château, suspendu par quatre chaînes d’or entre le ciel et la terre. »
    — « A-t-il vraiment dit cela ? »
    — « Il l’a dit, je vous l’assure. »
    — « Eh bien, s’il l’a dit, il faut qu’il le fasse, ou il n’y a que la mort pour lui. Qu’on le fasse venir. »

    Et, quand Riwall fut en la présence du roi :
    — « Est-il vrai, Riwall, » lui demanda le vieux monarque, que vous vous êtes vanté de pouvoir m’amener à la cour la belle princesse qui est retenue captive par un serpent, dans son château, suspendu par quatre chaînes d’or entre le ciel et la terre ? »
    — « Jamais je n’ai dit rien de semblable, sire, et il faudrait que j’eusse complètement perdu la raison pour le dire. »
    — « Vous l’avez dit, ma fille me l’a assuré, et il faut que vous le fassiez, où il n’y a que la mort pour vous. »
    — « Alors, il ne me reste qu’à tenter l’aventure, et, mort pour mort, autant vaut mourir ailleurs qu’ici. »

    Et il revint vers son cheval.

    — « Qu’y a-t-il encore de nouveau, mon maître, » lui demanda celui-ci, « que je vous vois si triste ? »
    — « Rien de bon, » répondit-il. « Le roi m’ordonne, sous peine de la mort, de lui amener à sa cour la belle princesse qui est retenue captive par un serpent, dans son château, suspendu par quatre chaînes d’or entre le ciel et la terre. Jamais je n’avais, jusqu’ici, entendu parler de cette princesse, et je ne sais pas où aller la chercher. »
    — « Moi, je sais où sont la princesse et le château, » reprit le cheval, « mais, il y a loin d’ici là, et il n’est pas facile d’y aller. N’importe, il faut tenter l’aventure, et, si vous faites exactement ce que je vous dirai, nous pourrons encore nous en tirer sans trop de mal. Retournez vers le roi et dites-lui de me faire attacher à chaque pied un fer d’argent de cinq cents livres, avec dix clous de même métal dans chacun d’eux. Puis, vous lui demanderez encore de vous fournir une bonne épée d’acier trempée dans du venin d’aspic, et qui coupera fer aussi facilement que du bois. »


    Vous me briderez, sellerez
    Et les clous examinerez
    C’hui ma vrido hag a dibro,
    A dalc’ho compt cuz ann tacho. 

     

      A DEMAIN POUR LA SUITE


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