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    La princesse du Palais enchanté

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    Selaouit, mar hoc’h eur c’hoant,
    Setu aman eur gaozic koant,
    Ha na euz en-hi netra gaou,
    Mès, marteze, eur gir pe daou.

    Ecoutez, si vous voulez,
    Voici, un joli petit conte,
    Dans lequel il n’y a pas de mensonge,
    Si ce n’est, peut-être, un mot ou deux.

     

    Il y avait une fois un roi de France dont les ancêtres avaient régné dans ce pays, depuis neuf générations.

     

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    Il n’avait jamais visité la Basse-Bretagne.


    Un jour, la fantaisie lui prit d’y venir, avec une suite nombreuse.


    Il fit accoutrer un beau carrosse et partit.


    Il fut bien accueilli par le roi de Bretagne, lui et sa suite, et l’on allait chasser, tous les jours, dans les grandes forêts du pays.

     

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    Un jour, le roi de France mit une telle ardeur à poursuivre un sanglier que ses gens ne purent le suivre et il s’égara.


    Le voilà bien embarrassé.


    La nuit vint et il monta sur un arbre pour attendre le jour, car la forêt abondait en bêtes fauves de toute sorte.


    Il aperçut une petite lumière, qui ne paraissait pas bien éloignée.


    Il descendit de l’arbre et se dirigea vers la lumière.


    Il arriva à la hutte d’un pauvre bûcheron et demanda un abri pour la nuit et quelque chose à manger.

     

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    Nous sommes de pauvres gens, lui dit le bûcheron, et notre hospitalité paraîtra sans doute bien médiocre à un seigneur comme vous ; quoi qu’il en soit, c’est de bon cœur que nous partagerons avec vous le peu que nous avons.
    Puis, s’adressant à sa femme :
    — Il faut nous apprêter, Plésou (Nom de femme autrefois très commun en Basse-Bretagne et aujourd’hui disparu), le lièvre que je vous ai apporté hier.
    — Un lièvre ? dit le roi ; et si les gardes le savaient et le disaient au roi ?
    — Et comment le sauraient-ils ? Ce ne sera pas par vous, probablement ? Et puis, le bûcheron est maître dans sa hutte, je pense, comme le roi l’est dans son palais.
    — Assurément, mon brave homme, répondit le roi.


    La femme du bûcheron accommoda le lièvre, à sa façon, et l’on s’attabla et l’on mangea de bon appétit, en causant de choses et d’autres.


    Bien ! Mais, voilà que la femme du bûcheron accoucha, dans la nuit, d’un gros garçon.

     

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    Le roi s’offrit pour en être le parrain.

     

    Mais, où trouver une marraine de qualité comme il convenait pour un pareil seigneur ?


    — Allez demander la demoiselle du château, mon homme, dit la bûcheronne à son mari.


    Et le bûcheron endossa son habit des dimanches et prit la route du château.


    Il fit part à la châtelaine du sujet de sa visite. La demoiselle, qui était près de sa mère, s’écria aussitôt avec dédain :


    — Moi servir de marraine au fils d’un bûcheron, et avec un charbonnier pour parrain, peut-être !

     

    Cherchez donc ailleurs des gens de votre condition !


    Et elle se leva pour s’en aller.


    — Le parrain, dit le bûcheron, est un beau et riche seigneur, et j’ai pensé qu’il convenait de lui choisir une commère aimable et jolie.
    — Un riche et beau seigneur ?… Qui est-ce donc ? demanda la demoiselle, intriguée.
    — Je ne saurais, en vérité, vous dire qui il est, ni d’où il vient ; mais, il est vêtu très richement, il est beau et généreux et je ne serais pas étonné qu’il fût prince, le fils de quelque puissant monarque peut-être. Il s’est égaré en chassant dans la forêt, il est venu frapper à notre porte, il a passé la nuit dans notre hutte, il était présent quand ma femme est accouchée et s’est offert lui-même pour être parrain.
    — Si c’est ainsi, dit alors la demoiselle, je veux bien être la marraine de votre enfant et je vais m’apprêter à me rendre chez vous.


    Le bûcheron s’en retourna chez lui, tout joyeux, et la jeune châtelaine arriva aussi, peu après, dans un beau carrosse et parée de tous ses atours.


    On se rendit au bourg, pour le baptême.

     

    Quand ils arrivèrent au presbytère, ils trouvèrent le vicaire qui battait du lin, le curé qui le broyait et la servante qui le peignait, ce qui étonna fort le roi ( Ceci est un trait de mœurs introduit arbitrairement par ma conteuse, et faisant allusion à la vie simple et patriarcale de nos anciens curés de campagne d’autrefois).


    — Venez baptiser mon enfant, Monsieur le Curé, dit le bûcheron au curé.
    — Nous y allons tout de suite, répondit celui-ci.


    Et le curé et son vicaire secouèrent la poussière dont ils étaient couverts, revêtirent leurs soutanes, qu’ils avaient ôtées, et se rendirent à l’église.


    Quant le curé vint recevoir l’enfant, dans le porche, il reconnut le roi, qu’il avait vu, dans un voyage à Paris, et se jeta à ses pieds.


    — Relevez-vous, Monsieur le Curé, lui dit le monarque, on ne doit se mettre à genoux que devant Dieu.


    L’enfant fut baptisé et reçut le nom de Efflam.

     

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    En entendant sonner les cloches, à toute volée, les pages du roi et les seigneurs de sa suite, qui le cherchaient depuis la veille, s’écrièrent :


    — C’est pour le roi, sans doute, que l’on sonne de la sorte !


    Et ils coururent au village et leur joie fut grande de retrouver leur roi en vie et sans mal.


    En prenant congé du bûcheron, le roi lui donna une poignée de pièces d’or, puis, lui présentant un anneau orné d’un gros diamant, il lui dit :

     

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    — Quand mon filleul aura atteint l’âge de quatorze ans, vous lui direz de venir me voir, à Paris, et vous lui donnerez cet anneau, qui me le fera reconnaître.


    Le roi de Bretagne célébra le retour de son hôte par un grand festin, et peu de temps après, le roi de France prit congé de lui et retourna à Paris.


    Le bûcheron acheta des terres et fit bâtir une belle maison, avec l’argent que lui avait donné le parrain d’Efflam, et il était à présent un des plus riches bourgeois du pays.


    Il envoya son fils à l’école, dans la ville la plus voisine, et, comme l’enfant était intelligent, il fit des progrès rapides (Tout ce début jusqu’ici semble appartenir à un autre type que le reste du conte).

     

    A DEMAIN POUR LA SUITE



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