-
Triste destin de Jobic « Le Diod » (1ère partie)
Triste destin de Jobic « Le Diod »
Première partie
- « Ah ! Si j’avais vingt ans » disait mon grand-père à longueur de journée. « Ah ! Si j’avais vingt ans ».
Cette phrase je l’ai entendu la prononcer dix fois, cent fois, mille fois.
En ce jour du 12 juillet 1941, moi, Jobic Salun, cantonnier à Saint-Thégonnec dans le nord Finistère, je les ai ces vingt ans si chers à mon Grand-Père, mais ce n’est pas pour autant que je peux faire tout ce que Grand-Père souhaitait faire à vingt ans.
Grand-Père Marcel
était décédé depuis près d’une dizaine d’années déjà, et il avait bercé mon enfance par ces récits des deux guerres, celle de 70 et celle de 14 bien sûr.
Il n’avait pas connu la présente. Et pourtant, il savait déjà à la fin de la précédente que celle-ci aurait bien lieu.
Je le revois encore discuter avec mon père, le soir, à la veillée, au coin du feu, dans la ferme familiale.
C’était à la fin des années 20, je n’avais pas dix ans, mais leurs conversations s’étaient gravées dans ma mémoire...
- « Salauds de politiciens! Tous des pourris ! Ils nous ont bouffés notre vie ces gars-là ! Allez-vous battre disaient-ils ! C’est pour l’honneur de la patrie ! Pour la grandeur de la France ! Belle connerie, oui ! »
- « Vous n’allez pas recommencer Père, vous savez bien que ça nous fait du mal de nous rappeler ces moments-là. »
- « Déjà en 70, ils avaient forcé mon Père à y aller, oui mon Père, ton Grand-Père à toi fils, et ton Arrière-Grand-Père, à toi fiston...
S’il avait su ! Il m’a raconté plus tard ! Une vraie boucherie !
C’était encore plus dégueulasse que quand on tue le cochon ! Ses copains qui criaient sur les champs de bataille. Celui-ci un bras en moins, celui-là les tripes à l’air ! C’était l’horreur ! Tous ces cris ! Et les autres ! Terrés ! A attendre l’ordre de l’assaut ! A attendre la mort ! Sans savoir lesquels d’entre eux gueuleraient encore plus fort dans quelques minutes ! »
- « Arrêtez Père! Pensez à autre chose ! »
Chez mon Grand-Père, ces souvenirs étaient devenus une obsession.
- « Tous des salauds j’te dis ces ronds de cuir ! Ils ne risquaient pas grand-chose dans leurs petits salons parisiens pendant que les types biens crevaient la gueule ouverte ! Et tout ça pourquoi ? Pour rien fiston ! Pour rien ! C’est fini qu’ils leur ont dit ! Vous pouvez rentrer chez vous. Tu parles oui ! Cela leur manquait trop à ces cochons ! Leur a pas fallu longtemps pour remettre ça ! Aller hop ! En 14 !
Rebelote !»
- « Je sais père, j’y étais aussi. »
- « De la chance qu’on a eu tous les deux d’en revenir ! De la chance fils ! »
- « Vous y avez quand même laissé un œil Père, et des éclats d'obus qui vous font toujours souffrir ! »
- « De la chance gamin, j’te dis ! Y’a qu’à regarder le monument aux morts de la place de la mairie ! La plaque comporte plus de noms que la commune voit de naissance en quinze ans ! De la chance qu’on en soit revenu tous les deux ! »
- « Cela ne sert à rien de parler de tout ça Père ! C’est du passé maintenant ! Ils ont compris ! Il n’y en aura plus de guerre. »
- « Plus de guerre ? Crois-tu ! Attends que ça leur reprenne à ces salauds ! »
- « Je vous assure Père. C’était la « der des ders ». Ils l’ont promis. »
- « La der des ders! Pour ceux qui y crèvent oui! Pour eux c’est la der des ders! Mais pour les autres, pour toi, pour le petit Jobic! Cela ne sera jamais fini! Ils remettront ça, tu verras! Encore et encore! Cela ne finira jamais fils! Jamais! »
- « Arrêtez Père ! Vous faites peur au p’tiot ! Ils l’ont dit ! C’était la dernière ! C’est fini maintenant ! »
- « Crois-moi Jobic ! Crois ton Grand-Père petit ! La der des ders ! C’est uniquement pour ceux qui y restent, gamin ! Uniquement pour ceux qui y restent ! »
- « Taisez-vous Père ! Vous allez finir par lui chambouler la tête au gamin avec vos histoires ! »...
A demain pour la suite
Tags : pere, grand, fin, triste, destin, cantonnier, jobic, diod, Marcel, guerre
-
Commentaires
bonjour chere Zaza, merci pour ton gentil passage, les vietnamiens en savent aussi quelque chose de la guerre !! bon dimanche et grosses bises
J'espère ne jamais connaître la guerre ce qui semble une évidence. Mais quand on voit le comportement de certains politiques on s'interroge.. il y a ceux que la guerre enrichit (les marchands et tranfiquants de canons notamment) et ceux qu'elle excite car incapable ils sont de vivre simplement.
Hélas la guerre est à nos portes et des enfants chaque jour meurent de la connerie de leurs aînés.
Bouh!!
Je t'embrasse amie conteuse.
salut
le devoir de mémoire doit être poursuivi mais des anciens qui ont fait la dernière il n'y en aura plus dans peu de temps.
C'est pour ca qu'il faut écouter les anciens!
bonne journée
bonjour chère Zaza, nous nous cotoyons sur les blogs, un petit bonjour en passant, superbe cette histoire...ma jeunesse a été "bercée" par les souvenirs de mon père, parti en 1912 et rentré en 1919, heureux d'avoir échappé à cette boucherie, il a cessé d'en parler quand il a vu les allemands passer devant notre porte en 1940... merci pour ce beau récit, amitiés et grosses bises de nous deux
Zaza,
Le devoir de mémoire on est en plein dedans. J'ai visité récemment la carrière Wellington à Arras. Un sacré moment d'histoire aussi. Mes camarades qui habitent Vimy vont avoir aussi beaucoup de choses à ce sujet par chez eux.
Une belle entrée en matière.
Bone soirée.
23Mimi de BrugesMardi 13 Août 2013 à 18:59Oh triste histoire pour cette famille et pour bien d'autres, malheureusement ce n'était pas la der des der.
Bisous
J'ai perdu mon commentaire, je recommence. merci pour ton récit il est très émouvant, et ce dialogue entre deux génération rappelle des souvenirs douloureux pour la guerre 39-45 pour ma part. Tu es très douée pour l'écriture, merci de partager ce don avec nous. Gros bisous et j'attends la suite avec impatience. Josette de marraineromande
Oh! prenant ton récit, les guerres de 14-18, et de 39-45 ont été meurtrière en France mais dans d'autres pays européens aussi. et ecrire un récit sur ce sujet, est très émouvant, et réveille des souvenirs parfois douloureux. mais bravo et merci
Gros bisous chère Zaza de Josette de marraineromande.
Bonsoirma douce Zaza
Ilk faut se souvenir pour que cela ne recommence pas, ce fut deux guerres horribles et tellement meutrières!Je te souhaite ma puce une bonne soirée avec plein de gros bisous
NB : Mon PC a été restauré, mais j'ai perdu des fichiers, ces pannes consécutives d'internet me gavent
MélineBisous Amie Zaza,
Eh oui quelle belle saloperie que la guerre et cette horrible mort appelant des jeunes âmes de tous camps...
Un sage avait donné une belle définition de la guerre et de tous conflits...: Ce sont des jeunes hommes qui ne se connaissent pas et qui aimeraient bien se connaître qui se rencontrent et qui s'entretuent pour des gens qui se connaissent pas et qui ne combattent pas, soit pour l'honneur ou pour un lopin de terre...
http://www.dailymotion.com/video/xn5d5_mourir-pour-des-ide-es_music
bonjour ZAZA..
la guerre est parait il un hommage au courage....et aussi à la bétise...
beau récit plein d'émotions...
bonne journée avec tes tiens...
car
"un tien..vaut mieux que deux tu l'auras"
bises
j'espère ne jamais connaitre la guerre , quand on connait comment se sont passées les dernières !
ton histoire va faire remonter plein de lectures, films et émotions ..
a demain pour la suite
bonjour, nous voilà repartis dans de nouvelles aventures, pour notre plus grand plaisir! je te souhaite une bonne journée bisous
Bonjour Zaza; ce texte me touche très profondément et très particulièrement.J'en suis fort émue.
Précédemment,j'ai aussi écrit pas mal de choses sur le sujet, d'autant plus que je suis belge ,et que mes origines se situent , en Belgique, près de Ypres, où la guerre des tranchées fut atroce.Il y a là la reconstitution d'une tranchée : "Le boyau de la mort" .Pas mal de mes ancêtres furent éjectés de leurs tombes lors des terribles combats qui se déroulèrent dans la région.
Mes ancêtres (d'origine) sont du Nord (59) et là encore, ce déroulèrent bien des combats.
Autre com' : merci pour le partage très personnel , quant au "retour" de ta fille.
Je t'embrasse très fort .Je t'apprécie beaucoup.
Francine Clio
C'est vrai que l'on espère toujours que ce soit la dernière... et pourtant...
A tout bientôt pour la suite.
Bises et douce journée, Zaza.
nos arrières grands parents et grands parents et nos parents connaissaient le prix en vie humaine et autre de la guerre, alors les "va-ton-en guerre" horreur !
j'ai hâte de lire la suite de ton "diot" zaza
Bises et belle journée @++
Des moments intenses que nos anciens n'ont jamais pu effacer de leur mémoire !!!
Je te suis pour demain
Bises Zaza
bonjour Zaza
ah ces horreurs de guerres , gravées dans les mémoires
je lirai avec plaisir la suite demain
le soleil arruve mais il fait 12 degrés dehors aprem nous aurons 22 , les pelouses sont séches nous avons quand même un bel été provision de soleil pour cet hiver
bises
( tu nous montreras ta vigne ) je sais que à Morlaix il y en à il y à une rue des vignes )
kenavo
de bien triste souvenirs, que ces hommes avaient en mémoire pour le restant de leurs jours.....ça doit marquer à jamais.....passe une bien agréable journée
Comme il a raison le grand-père, la der des ders est pour ceux qui y restent. J'ai souvent entendu des récits de la "dernière" par maman qui travaillait au bloc opératoire, elle avait 17 ans et suite à un bombardement, elle a vu arriver une dame le ventre ouvert et tous les organes sortis, elle parlait et ne sentait pas la douleur. Le médecin n'a rien pu faire, juste tout remettre et recoudre. Sans compter celles et ceux qui arrivaient avec des membres en moins etc.... Ton récit me rappelle celui que j'ai toujours entendu.
Bises et bon mardi
Bonjour Zaza,
Je n'aime pas la guerre, elle me fait peur. J'espère ne jamais en connaître une, ainsi que pour mes enfants.
J'espère ne jamais vivre cette horreur ...
Bon mardi, amitié, gros bisous, Véronique
Ajouter un commentaire
...merci pour l'anniversaire, en effet le 25 il doit se passer quelque chose ! habituellement nous fetons ça chez un des enfants, cette fois ce sera chez nous , bisous