• Le Prince Turc Frimelgus

    Le Prince Turc Frimelgus

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    Rèd ê ma ouefac’h
    Penaoz eur veach.


    Il faut que vous sachiez
    Comment une fois.

     


    Chapitre I

     
    Il y avait une fois une jeune fille qui demeurait avec son père et sa mère, lesquels faisaient valoir une bonne métairie et vivaient à leur aise.


    Cette fille, nommée Marguerite, était fort jolie, et tous les jeunes gens du pays, un peu riches, se fussent estimés heureux de l’avoir pour femme.


    Mais, si Marguerite était jolie, elle était aussi coquette et fière, et elle dédaignait les fils de paysans qui voulaient lui faire la cour, même les plus beaux et les plus riches.


    Son père et sa mère voyaient cela avec peine, et ils lui disaient parfois :
    — Qui prétends-tu donc avoir pour mari, que tu ne trouves personne à ton gré ?
    — Un prince, répondait-elle. Je ne veux me marier qu’à un fils de roi.


    Elle avait deux frères à l’armée, deux cavaliers, deux beaux hommes, qui lui avaient parlé du fils de l’empereur de Turquie, qu’ils avaient vu quelque part, et depuis, elle avait l’esprit continuellement occupé de ce prince.


    Voilà qu’un jour il arriva à la ferme un seigneur monté sur un beau cheval, et qui n’était pas habillé à la manière du pays.


    Personne ne le connaissait.


    Il demanda à voir Marguerite.


    Dès qu’il l’eût vue et qu’il se fût un peu entretenu avec elle, il s’écria :


    « Celle-ci sera ma femme ! »


    — Sauf votre grâce, Monseigneur, lui répondit la jeune fille, je ne me marierai qu’au fils d’un empereur ou d’un roi.
    — Eh bien ! Je suis le fils d’un empereur, et d’un des plus puissants qui soient sur la terre. Mon père est l’empereur de Turquie, et son nom est Frimelgus. Il y a longtemps que je voyage, à la recherche d’une femme qui me convienne, et nulle part, je n’en ai trouvé une qui me plût comme vous. Je le répète : je n’aurai jamais d’autre femme que vous.


    Il lui donna de riches parures de perles et de diamants, puis, il donna aussi à son père et à sa mère des poignées d’or et d’argent, si bien qu’ils étaient tous contents et heureux.


    Les fiançailles se firent dès le lendemain, les noces, dans la huitaine, et il y eut de grands festins, des danses et des jeux, pendant plusieurs jours.


    Quand les fêtes furent terminées, le prince Frimelgus fit monter sa femme dans un beau carrosse doré, et partit avec elle pour son pays.


    Marguerite vécut heureuse et sans souci aucun avec son mari, pendant six mois.

    Tout ce qu’elle souhaitait, elle l’obtenait aussitôt, beaux habits, riches tissus, parures de perles et de diamants.


    Et, tous les jours, de la musique, des danses et des jeux de toute sorte.


    Au bout de six mois, elle se sentit enceinte, et en ressentit une grande joie.


    Son mari, au contraire, loin de témoigner quelque satisfaction à cette nouvelle, la reçut avec mécontentement.


    Il devint triste et soucieux et rien ne pouvait plus le distraire.


    Un jour, il dit à sa femme qu’il lui fallait entreprendre un long voyage, pour aller voir un autre prince de ses amis, je ne sais dans quel pays lointain.


    Avant de partir, il lui remit toutes les clefs du château (il y en avait un grand trousseau) et lui dit qu’elle pouvait s’amuser et se distraire, comme elle l’entendrait, en attendant son retour, et aller partout dans le château, à l’exception d’un cabinet qu’il lui montra et dont la clef était pourtant avec les autres, dans le trousseau.


    — Si vous ouvrez ce cabinet, ajouta-t-il, vous vous en repentirez bientôt. Promenez-vous dans les jardins, visitez, comme il vous plaira, toutes les chambres, et les salles, de la cave aux greniers, mais, je vous le répète, gardez-vous bien d’ouvrir la porte de ce cabinet.


    Elle promit de ne pas ouvrir la porte, et Frimelgus partit.


    Marguerite se mit alors à parcourir le château, qui était très vaste, et à visiter les salles et les chambres où elle n’était jamais entrée, jusqu’alors.


    Elle marchait d’étonnement en étonnement, car les salles et les chambres étaient toutes plus belles les unes que les autres, et pleines d’or, d’argent, et de riches parures de toute sorte.


    Son trousseau de clefs à la main, elle ouvrit toutes les portes, entra partout et vit tout, à l’exception pourtant du cabinet défendu.


    A chaque fois qu’elle passait auprès, elle se disait :

    — Que peut-il donc y avoir là dedans ?


    Et cela la préoccupait beaucoup et excitait vivement sa curiosité.


    Elle regarda plus d’une fois par le trou de la serrure, et ne vit rien.

     

    Elle y introduisit même la clef… mais, alors, les paroles de son mari lui revenaient à la mémoire, et elle avait peur, et s’éloignait.


    Il y avait huit jours que le prince était parti, lorsqu’un jour, ne pouvant résister plus longtemps à la tentation, elle introduisit encore la clef dans la serrure, la tourna, toute tremblante d’émotion, et entr’ouvrit la porte, tout doucement….


    Mais, au premier regard qu’elle jeta dans l’intérieur du cabinet, elle poussa un cri d’effroi et recula d’horreur.


    Sept femmes étaient là, pendues chacune à une corde fixée à un clou dans une poutre, et se mirant dans une mare de sang !


    C’étaient les sept femmes que le prince Frimelgus avait épousées, avant Marguerite, et qu’il avait toutes pendues dans ce cabinet, quand elles étaient devenues enceintes.


    Marguerite était tombée sans connaissance sur le seuil.


    Quand elle revint à soi, elle ramassa son trousseau de clefs, qui était tombé dans le sang, puis elle referma la porte du cabinet.


    Elle lava d’abord ses clefs avec de l’eau froide, et le sang qui les souillait disparut sur toutes, à l’exception de celle du cabinet défendu.


    Ce fut en vain qu’elle lava celle-ci avec de l’eau chaude et la racla avec un couteau, et la frotta avec du sable, la maudite tache ne disparaissait pas !


    Voilà Marguerite désolée.


    En apercevant ce sang, se disait-elle, mon mari saura que je lui ai désobéi, et que j’ai ouvert le cabinet défendu !…


    Pendant qu’elle était encore occupée à laver et à frotter la clef, Frimelgus arriva.
    — Que faites-vous là, ma femme ? demanda-t-il, bien qu’il sût déjà la vérité.
    — Rien, répondit la jeune femme, toute troublée, et en essayant de dissimuler les clefs.
    — Comment, rien ? Montrez-moi ces clefs-là ! Et il lui arracha le trousseau de clefs des mains, et, prenant la clef du cabinet défendu et l’examinant :
    — Ah ! Malheureuse femme, s’écria-t-il, tu ne vaux pas mieux que les autres, et tu auras le même sort qu’elles !
    — Oh ! Ne me tuez pas ! Ne me tuez pas ! Ayez pitié de moi, je vous en prie ! Criait la pauvre femme.
    — Non, point de pitié !


    Et Frimelgus la jeta à terre, et, la saisissant par ses longs cheveux blonds, il se mit à la traîner jusqu’au cabinet fatal, pour l’y pendre, comme ses sept autres femmes.


    La pauvre Marguerite criait de toutes ses forces :


    « Au secours ! Au secours !… »


    En ce moment, on entendit sur le pavé de la cour le bruit des pieds de deux chevaux arrivant au galop. Deux cavaliers venaient, en effet, d’y entrer.


    C’étaient les deux frères de Marguerite, qui venaient la voir.


    En entendant des cris de détresse, ils descendirent promptement de leurs chevaux, et entrèrent dans le château.

     

    Ils virent Frimelgus qui traînait leur sœur par les cheveux, et, dégainant leurs sabres, ils tombèrent sur lui et le criblèrent de blessures.


    Puis, prenant Marguerite en croupe, ils quittèrent aussitôt le château, et s’en retournèrent avec elle à la maison, après avoir, pourtant, rempli leurs poches d’or et de pierres précieuses. (C’est jusqu’ici, comme on le voit, une variante du conte de Barbe-Bleue de Ch. Perrault. Doit-on croire à une réminiscence ou à une imitation directe de cet auteur ? Je ne saurais le dire, mais, je dois faire remarquer que mon conteur ne savait ni lire ni écrire. Cette première partie du conte semble du reste parfaitement étrangère à la seconde, qui appartient à un autre cycle et à un tout autre ordre d’idées; mais, comme toujours, j’ai cru devoir reproduire intégralement le récit de mon conteur.)

     

    A DEMAIN POUR LA FIN

     

    « La chapelle du Crucifix, édifiée par le frère Clément en 1891Blagounettes du dimanche....!!! »

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  • Commentaires

    19
    Lundi 31 Janvier 2011 à 21:56
    Anne d'Amico

    C'est vrai qu'on dirai un "remake" de Barbe-Bleue... je vais direct à la suite!!

    Bisous bisous!

    18
    Lundi 31 Janvier 2011 à 00:53
    Quichottine

    J'avais raté ce début... mais je viens de le lire et je file à la suite.

    Merci, Zaza.

    17
    Samedi 29 Janvier 2011 à 23:19
    catcent

    Il est sûrement un grand conteur, c'est très beau.

    Bisous ZAZA à demain bye

    16
    Samedi 29 Janvier 2011 à 23:15
    tiot

    salut

    pas mal cette hiostoire

    ca ressemble pas à barbe bleue

    bonne soirée

    15
    Samedi 29 Janvier 2011 à 22:21
    •-~·*'Ś Ő Ń Ŷ Á'*·~-

    la curiosité est un bien grand défaut

    elle a faillit perdre sa vie par sa désobéissance

    je ne veux pas la juger , je pense que j'aurai fait pareil

    bisous 

     

    •-~·*'Ś Ő Ń Ŷ Á'*·~-• 972

    14
    Samedi 29 Janvier 2011 à 20:54
    FRANCOISE

    Moi, je ne m'inquiète pas, je pense que ça va s'arranger, pas vrai Zaza ? Bises. FRANCOISE

    13
    Samedi 29 Janvier 2011 à 20:08
    francine

    bonsoir, j ai hâte delire la suite et de savoir ce qu il va se passer!! bonne soirée gros bisous

    12
    Samedi 29 Janvier 2011 à 19:28
    peintrefiguratif

    c"est les femmes de barbes bleue cette histoire bisous

    tu devrais te faire conteuse dans les café de bretagne bisous

    11
    Samedi 29 Janvier 2011 à 18:18
    cafardages

    ZaZa, tu nous bottes tu sais ? Bizzz des cafards

    10
    Samedi 29 Janvier 2011 à 17:36
    Nettoue

    mais c'est quasiment Barbe bleue ce salaud, sauf qu'il n'y a pas soeur Anne !

    Vivement demain

    Bisousss ma Zaza

    9
    Samedi 29 Janvier 2011 à 17:28
    fanfan

    Effectivement cela fait penser à Barbe-Bleue , c'est étonnant ; peut-être le conteur l'avait-il entendue et ensuite arrangée à sa manière?

    Bisous

    8
    Samedi 29 Janvier 2011 à 16:34
    Ramu

    Une belle histoire et qui se termine bien!Bonne journée,Zaza.Bizz

    7
    Samedi 29 Janvier 2011 à 15:11
    Aimé jc

    Bonjour Zaza

    Beau cure dents que voilà !! LOL

    Et que de présence et, de prestance aussi !

    Beau et intéressant billet, on y apprend encore pas mal de chose mon amie !

    A bientôt !!

    6
    Samedi 29 Janvier 2011 à 15:07
    moqueplet

    étrange histoire et quel horrible sort cette femme devait subir.....passe un bela après midi

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    5
    Samedi 29 Janvier 2011 à 14:21
    Anne Bilou

    bonjour zaza

    une belle leçon sur la curiosité

    mais là ...a-t-elle bien fait ou pas ?

    tout gros bisous passe une bonne après mdi

    4
    FLB
    Samedi 29 Janvier 2011 à 13:01
    FLB

    Des turcs en Bretagne ??? Mais où va t-on !!

    Ahhhh, la curiosité féminine, ça, ce n'est pas une légende !!

    Il me semble que tu avais fait un article où apparaissait barbe bleue, ou barbe noire ?

    Reste une question essentielle, ou existentielle, pourquoi ce prince ne veut pas se "reproduire" ? Un mauvais sort ? Une malédiction ?

    Bises ma Zaza !

    3
    Samedi 29 Janvier 2011 à 12:37
    canelle56

    Encore  une belle série ...bises Zaza

    2
    Samedi 29 Janvier 2011 à 12:35
    madame x

    tu vois que la curiosité est un vilain défaut...! remarque elle s'en sort bien...j'attends la fin, car je n'ai jamais lu le conte de Barbe Bleu...suis ignare...bon we. bisous.

    1
    Samedi 29 Janvier 2011 à 11:58
    Douar_Nevez

    Un superbe conte, merci ZAZA, je ne connaissais pas cette version avec le prince Frimelgus.

    Bisous et  bon week-end.

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