• Extraits des Contes Populaires de Basse Bretagne

     
     (fin)
     


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    Selaouit, mar hoc’h eus c’hoant,
    Hag e clevfot eur gaozic coant,
    Ha na eus en-hi netra gaou,
    Met, marteze, eur gir pe daou.

    Écoutez, si vous voulez,
    Et vous entendrez un joli conte,
    Dans lequel il n’y a pas de mensonges,
    Si ce n’est, peut-être, un mot ou deux.

     
     
    Le roi donna tout l’or de son trésor, pour fabriquer les fers et les clous, et, quand tout fut prêt, Riwall et son cheval se mirent encore en route.

    Ils marchent et marchent, nuit et jour, et rencontrent, dans un grand bois, une petite vieille, qui leur demande :
    — « Où allez-vous ainsi ? »
    — « Ma foi ! Grand’mère, » répond Riwall, « je ne sais pas trop ; le roi m’a ordonné d’aller chercher la pomme d’or et de la lui rapporter, sous peine de mort, et j’ignore complètement où elle se trouve. »
    — « Eh bien, » reprit la vieille, « je le sais, moi, et je veux vous conseiller et vous venir en aide. Vous arriverez bientôt sous les murs d’un vieux château, tellement perdu au milieu des arbres, des ronces, des épines et des herbes folles qui l’enserrent et l’envahissent de tous côtés, que l’accès en est impossible.

    Depuis cinq cents ans, personne n’a jamais pénétré dans ce château. Mais, voici une baguette blanche que je vous donne (et elle lui tendit une baguette blanche qu’elle avait à la main), et vous n’aurez qu’à en frapper les arbres, les ronces et les épines qui s’opposeront à votre passage, et aussitôt un beau chemin s’ouvrira devant vous et vous pénétrerez facilement jusqu’au château. Vous verrez dans la cour un pommier avec une pomme unique, la pomme d’or, qui brille dans le feuillage.

    Voici encore une serviette (et elle lui donna aussi une serviette) que vous étendrez sous l’arbre, puis vous monterez sur le pommier et secouerez la branche, de manière que la pomme tombe sur la serviette. Vous descendrez alors et, avec votre baguette, vous ferez une croix sur la pomme, qui se fendra en quatre et laissera voir un petit couteau d’argent, au milieu. Vous prendrez ce couteau et le mettrez dans votre poche, car vous en aurez besoin, plus tard.

    Vous ferez avec votre baguette une nouvelle croix sur la pomme, et elle se refermera comme devant. Alors, vous retournerez à la maison, avec la pomme et le couteau. Quand vous arriverez à la Cour, la fille du roi, qui est sorcière, vous priera de lui donner la pomme ; mais, ne la lui donnez pas.

    On fera un grand dîner, et la pomme d’or sera posée sur la table, dans un plat d’or. Le roi essayera de l’entamer, avec son couteau ; mais, ni lui ni aucun des convives ne pourra y réussir. Vous demanderez à essayer, à votre tour, et votre petit couteau d’argent y pénétrera facilement, comme dans une pomme ordinaire.

    Mais, aussitôt, la fille du roi tombera raide morte, devant tout le monde, et son cœur se fendra en quatre morceaux, comme la pomme. »
    — « Dieu vous bénisse, grand’mère, » dit Riwall.


    Et ils continuèrent leur route et se trouvèrent bientôt devant le château inaccessible.

    Riwall, de sa baguette blanche, frappa les arbres, les ronces et les épines qui s’opposaient à leur passage, et une belle route s’ouvrit par enchantement devant eux, et ils pénétrèrent facilement jusqu’à la cour.

    Ils virent le pommier et la pomme d’or qui brillait dans le feuillage, et une foule de petits oiseaux chantaient et voltigeaient autour. Riwall étendit sa serviette sur le gazon, monta sur l’arbre, secoua la branche et la pomme tomba sur la serviette.

    Il descendit aussitôt, fit avec sa baguette une croix sur la pomme, qui se fendit et laissa voir un gentil petit couteau d’argent caché à l'intérieur.

    Il le prit, le mit dans sa poche, referma la pomme avec une seconde croix de sa baguette, la mit également dans sa poche, remonta à cheval et partit.

    Il rencontra encore, dans le bois, la petite vieille, qui lui demanda :
    — « Eh bien ! Tout s’est-il bien passé, mon fils ? »
    — « Très bien, grand’mère, grâce à vous ; j’ai la pomme et le couteau, dans ma poche. »
    — « Eh bien, retournez, à présent, à la maison, tranquilles et sans inquiétude, car c’est la fin de vos travaux, et celle qui vous a fait imposer de si redoutables épreuves en sera bientôt récompensée comme elle le mérite. »

    Et ils continuèrent tranquillement leur route.

    Toute la Cour et le peuple étaient sortis de Rennes à leur rencontre, et ils rentrèrent dans la ville en grande pompe, au bruit des trompettes et des cloches sonnant à toute volée.

    Le vieux roi voulut que son mariage avec la princesse fût célébré immédiatement.

    Il y eut, dès le lendemain, un grand repas, auquel on invita beaucoup de monde, et Riwall en fut aussi.

    La pomme d’or était sur un plat d’or, devant le roi et sa fiancée, et tous les yeux étaient fixés sur elle.

    Au dessert, plusieurs convives demandèrent qu’on la partageât.
    — « Donnez-la-moi et je la partagerai, » dit la fille du roi, la sorcière.
    — « Non, c’est à la fiancée du roi que doit revenir cet honneur, » lui répondit-on.

    Et le roi prit la pomme sur le plat d’or et la présenta à la belle princesse.

    Mais, celle-ci essaya en vain de la diviser ; son couteau glissait dessus comme sur de l’or massif.

    Le roi essaya à son tour, mais sans plus de succès.
    — « Passez-moi la pomme, » dit de nouveau la fille du roi ; » j’en viendrai bien à bout, moi. »

    On la lui passa, et elle ne réussit pas davantage.
    — « Passez-la-moi, sire, » dit aussi Riwall ; « c’est moi qui vous l’ai conquise et je sais aussi comment l’ouvrir. »

    Le roi lui passa la pomme, et, avec son petit couteau d’argent, qu’il tira de sa poche, il la fendit en quatre, le plus facilement du monde.

    Mais, aussitôt, on vit avec étonnement la fille du roi tomber sous la table, et, en la relevant, on vit qu’elle était morte ; son cœur s’était brisé et fendu en quatre morceaux, comme la pomme.
    — « A chacun selon ses oeuvres ! » dit alors l’autre princesse, car elle avait mérité ce qui lui arrive, en voulant la mort de mon libérateur.

    Puis, se tournant vers le roi :
    — « Quant à vous, sire, vous êtes trop âgé pour moi ; d’ailleurs, à celui qui a eu la peine est aussi due la récompense. »

    Et, en même temps, elle présenta la main à Riwall, avec un doux sourire.

    Le mariage de la jeune princesse et de Riwall fut célébré, avec grande pompe et solennité, et, pendant un mois entier, il y eut de belles fêtes et des jeux et des repas magnifiques.


    J’étais la cuisinière,
    J’eus une goutte et un morceau,
    Un coup de cuillère à pot sur la bouche,
    Et depuis, je n’y suis pas retournée ;
    Avec cinq cents écus et un cheval bleu,
    J’y serais allée voir demain ;
    Avec cinq cents écus et un cheval brun,
    J’y serais retournée, dans une semaine et un jour


    Me oa eno keginerès,
    Em boa eun tamm hag eur bannec’h,
    Eun tol klogè war ma géno,
    Hag a-baoue n’oun kel bet eno.
    Gant pemp kant skoed hag eur marc’h glaz
    Vijenn êt da welet, warc’hoaz,
    Gant pemp kant skoed hag enr mar’h brunn,
    Vijenn êt, warc’hoaz ar penn-sunn..

     

    Conté par Francésa Ann Ewen, de Péderne
    (Côtes-du-Nord). 1869.

     


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