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Le Passeur de Guipry/Messac
Le Passeur de Guipry/Messac
A cette époque-là il n'y avait pas encore de pont entre les ports de Guipry et de Messac.
Le port de Guipry
Le pont maintenant
Un passeur transportait d'une rive à l'autre de la Vilaine, à l'aide de sa barque, les gens qui en faisaient la demande.
C'était un homme vêtu de guenilles, vivant chichement des légumes de son jardin et des poissons qu'il pêchait dans la rivière.Il habitait une bielle maison installée sur la berge de Guipry.
S'il ne s'y trouvait pas, il était tout à côté, dans sa barque, surveillant sa ligne et attendant les rares passagers qu'il devait emmener sur l'autre rive pour le prix de quelque menue monnaie.
Il ne s'absentait que le dimanche entre dix heures et midi.
Il se rendait alors à l'église pour assister à la messe.
Un dimanche - un 10 août précisément - la cérémonie religieuse revêtait cette année- là un éclat particulier.
Un abbé de Redon (Saint-Conwoïon, dit-on) officiait à l'église de Messac.
Saint-Conwoïon
L'affluence des fidèles était grande et notre passeur, homme dévot, n'avait pu trouver la place qu'il aurait aimé occuper aux premiers rangs de l'assemblée.
Il dut se contenter de rester debout au fond de l'église.
L'office durait déjà depuis près d'une heure, lorsque des bruits de voix se firent entendre à la porte de l'église :"Le passeur ! le passeur !".
Mais notre passeur ne bougea point.
Les cris redoublèrent.
Des paroles désobligeantes furent même lancées à l'intention de l'officiant et des fidèles assistant à la cérémonie, si bien que le passeur se décida à sortir de l'église.
Sous le porche, il se trouva nez à nez avec une bande de joyeux compères, auteurs de tout ce tintamarre.
Il s'agissait de deux énergimènes des environs qui avaient festoyé la nuit précédente et voulaient traverser la Vilaine pour se rendre à Guipry.
Le passeur partit avec eux.
Pendant ce temps, à l'église de Messac, la cérémonie prenait fin.
Le saint abbé de Redon, désireux de regagner son monastère au plus vite, se dirigea avec sa suite de moines vers la rivière où se trouvaient habituellement le passeur et sa barque.
Hélas! Aucune trace du passeur et de sa barque.
Les rives semblaient désertes. On eut beau héler le pauvre homme, aucune réponse ne se fit entendre.
Soudain le regard de l'abbé fut attiré par un remous près de la berge.
Un grand tourbillon d'eau où apparaissaient par moment des vêtements d'hommes et les guenilles du passeur…
Pas de doute, les jeunes gens en goguette avaient fait chavirer la barque.
Tous ses passagers s'étaient noyés.
Après bien des difficultés un moine de la suite de Saint-Conwoïon réussit à accrocher une jambe du passeur et à tirer l'infortuné sur la berge.
Il était malheureusement trop tard : l'homme était mort.
Son corps gonflé d'eau ne laissait aucun doute à ce sujet.
Cependant le saint abbé estima qu'il ne méritait pas de payer l'erreur des jeunes gens.
Alors il le ressuscita.
Mais pour qu'il ne puisse pas raconter à ses semblables ce qu'il avait vu durant son court passage dans l'au-delà, il lui supprima l'usage de la parole.
Le passeur continua jusqu'à la fin de ses jours à assurer le transbordement des passagers d'une rive à l'autre de la Vilaine.
Mais au grand étonnement des gens qui le connaissaient et lui parlaient, il ne répondait jamais. Il était devenu muet.
En souvenir de cet homme, les passeurs qui prirent sa succession ne travaillaient plus le dimanche entre dix heures et midi, et surtout le 10 août, jour anniversaire de la mort du passeur ressuscité par Saint-Conwoïon.
Tags : passeur, eglise, guipry, homme, saint
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Commentaires
Belle histoire d'un homme revenu, à la vie et ça vaut bien de ne plus pouvoir parler, quoique Zazounette ...
Belle légende. Le passeur corvéable à merci se soumet aux invectives des jeunes gens et aux prières du saint homme.
Bisous Zaza
Mes pensées vont vers toi
Mounette
Une bien jolie istoire! Et je suis de l'avis de St Conwoïon, le passeur ne méritait pas de mourir peuchère! Mais bon, l'avoir rendu muet.... au contraire, il aurait pu vanter les beautés de l'au-delà!!
Gros bisous Zaza!
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Très jolie légende.
Merci, ma Zaza.