Un prix scolaire décerné à mon papa
pour son certificat d’étude.
Chapitre II (fin)
Où l’on rapporte le gracieux en entretien
De Madame Galaxaure Mistouflet
Ici le baron eut un soupir.
Puis à voix basse :
- Combien crois-tu qu’il faille lui donner, Pippo ?
- Monsou le baron, Mem Galaxaure est une personne très savante, mais aussi très susceptible. Si vous avez l’air de liarder avec elle, elle se fâchera et ne parlera plus……
- Enfin, un chiffre.
- Tenez, Monsou le baron, faites quelque chose qui la flattera énormément : donnez lui votre bourse.
Ici le baron eut un second soupir, puis il répondit :
- C’est qu’il y a beaucoup d’argent dans ma bourse, Pippo.
- Tans pis, mon bon maître, il ne faut jamais avoir trop d’argent dans sa bourse, ça ne peut profiter qu ‘aux voleurs, conclut naïvement l’ingénieux valet.
- Ou aux dames qui font de la magie, Pippo.
L’italien comprit qu’il avait dit une bêtise et changea de conversation.
- Vite, votre bourse, Monsou le baron
- Voici, Pippo.
Ici le baron eut un troisième soupir.
Mais Pepe Pippo ne se laissa pas attendrir, enleva dextrement ma bourse des mains de son maître et s’avançant vers le fauteuil de la devineresse salua respectueusement.
- Flambeau de science ! commença-t-il, lumière de philosophie, miroir d’alchimie, mon maître va se dépouiller entièrement pour honorer votre temple.
L’œil de Galaxaure était devenu inquiet.
Il suivait anxieusement la bourse qui roulait dans les doigts de l’Italien.
Pepe Pippo continua :
- Néanmoins, étoile d’Egypte, digne fille du grand Hermès, min maître juge que cette bourse ne peut pas payer la plus petite manifestation de votre talent. Plus tard, il reconnaîtra plus dignement les services rendus. En attentant, voici ce qu’il vous offre.
Et, avec un beau geste, Pepe Pippo tendit la bourse à Galaxaure qui la fit disparaître avec une célérité qui prouvait le peu de confiance qu’elle avait dans la probité de l’Italien.
La digne femme avait bien tort : tout en parlant et tout en gesticulant, l’ingénieux valet n’avait pris que deux doubles-louis.
Galaxaure se leva :
- Baron César Hervier Lechat Poulain de la Poulinière, dit-elle de sa voix prophétique, l’Esprit m’agite, je vais parler.
Elle étendit les bras, ses yeux devinrent hagards, tout son corps fut secoué d’un frisson.
Au bout de quelques secondes, elle reprit :
- Avant deux fois sept jours, tu auras des nouvelles de René, du beau René aux blonds cheveux. Tu reviendras ici, prévenu par moi, au jour et à l’heure indiqués. Tu sauras alors le lieu de sa retraite et comment il pourra mourir.
Le baron ne voulut pas en entendre d’avantage, les cheveux hérissés sous la perruque, les mains tremblantes, m’esprit en désordre, il s’élança hors de la chambre suivi du fidèle Pepe Pippo qui, pendant le discours terrifiant de Mme Galaxaure, s’était mis à quatre pattes et avait fini par retrouver, sous le ventre d’un grand lézard empaillé, le louis que la devineresse avait fait tomber des doigts du baron.
Quand la porte fut refermée et que les pas des hommes eurent sonné sur les marches jusqu’au bas de l’escalier, Galaxaure, quittant sont attitude fatale, envoya promener son capuchon, fouilla vivement dans sa poche et en tira la fameuse bourse dont elle étala sur ses genoux le contenu.
Lorsqu’elle eut constaté qu’elle avait gagné treize doubles-louis, quatre louis, cinq doublons d’Espagne et deux guinées d’Angleterre, ce qui faisait la jolie somme de neuf cent douze livres, un pâle sourire passa sur son maigre visage.
Puis se penchant, elle plongea la main sous son fauteuil.
De cette cachette mystérieuse, elle tira successivement un gobelet d’étain de dimension respectable et une ventrue bouteille qu’elle déboucha sans attendre.
Le flacon laissa alors échapper un arôme.
Ne croyez pas, mes chers amis, que Mme Galaxaure allait prendre verre de Citignac ou d’eau de Grenade, de fenouillette ou de rossolis du Roi, d’hippocras ou de ratafia d’œillet, toutes liqueurs aimées des dames, hélas !
Non, Mme Galaxaure allait boire plusieurs verres d’une eau de vie de 1696.
Cette femme supérieure s’adonnait à la boisson !
Les grands esprits on de ces faiblesses.
A DEMAIN POUR LA SUITE