Ce que l’on racontait
au siècle dernier...!!!
Camm ar Guluch, ainsi appellé parce qu'il boitait d'une jambe, était cordonnier à Plougrescant.
Il avait épousé en premières noces Louise Yvonne Marquer, une femme douce, un peu triste, que l'on voyait rarement sourire et qui semblait prédestinée à ne pas être longtemps de ce monde.
Elle mourut, en effet en donnant le jour à une petite fille qui était tout son portrait.
De sorte que Camm ar Guluch resta veuf avec l'enfant.
Mais il n'était pas homme à faire durer son veuvage. Et comme malgré son infirmité c'était un assez joli garçon et qu'il gagnait bien, il trouva vite un autre parti.
Moins de trois mois après la mort de Louise Yvonne Marquer, il se remariait avec une jeune de St Gonéry qui était, comme caractère, tout l'opposé de sa première femme.
Autant celle-là était d'humeur mélancolique, recherchant peu les réunions et ne se plaisant que dans son intérieur, autant celle- ci aimait à courir, danser, s'ébattre.
- « Cette fois-ci, j'ai eu une vive la joie » disait le cordonnier le soir de ses noces.
Ces noces avaient eu lieu dans la semaine de Pâques, dans la saison ou s'ouvre la période des pardons.
A partir de ce dimanche, il y a toujours fête quelque part.
Or, Jeanne Luzeron, la nouvelle femme de Camm ar Guluch, avait décidé qu'elle n'en manquerait pas
une.
Le mari fit bien quelques objections, dans le début, à cause de l'enfant, car il n'était pas, au fond, un mauvais père.
- « Bah ! » lui répondit la fille Luzeron, « ça pousse toujours, un enfant !... Et puis, c'est pour vous que je vous ai épousé et non pour cette petite
pleurnicharde. »
Pleurnicharde, l'enfant l'était devenue, en effet, sans doute parce qu'elle se sentait abandonnée.
Pendant que son père et sa marâtre allaient se promener et festoyer de-ci de-là, ne rentrant parfois qu'à une heure avancée de la nuit, la pauvre mignonne restait au logis, toute seule, étendue dans son berceau, sans soins et même sans nourriture, la porte fermée à clé sur elle.
A DEMAIN POUR LA FIN