Bez’a zo brema pell-amzer’
D’ar c’houlz m’ho devoa dennt ar ier.
Il y a de cela bien longtemps,
Quand les poules avaient des dents
On fit donc des préparatifs de noces au château, pour la troisième fois.
Comme ses deux aînées, la jeune fiancée alla causer avec les lavandières sur l’étang.
— « Comment », lui disaient-elles, « une jolie fille comme vous, vous allez vous marier avec quelqu’un qui a une tête de poulain, et après ce qui est arrivé à vos deux sœurs aînées
! »
— « Oui, oui », répondit-elle, avec assurance, « je me marierai avec lui et je n’ai pas peur qu’il m’arrive comme à mes sœurs ; s’il leur est arrivé malheur, c’est leur langue
qui en a été la cause. »
En ce moment, vint à passer le même seigneur que les deux autres fois, qui entendit la conversation, et poursuivit sa route, sans rien dire, cette fois.
Les noces eurent lieu avec grande pompe et solennité ; festins magnifiques, musique, danses, jeux et divertissements de toute sorte, comme les deux premières fois.
La seule différence fut que, le lendemain, la jeune mariée vivait encore.
Pendant neuf mois, elle vécut heureuse avec son mari.
Celui-ci n’avait sa tête de poulain que pendant le jour ; le soleil couché, il devenait un beau jeune
homme, jusqu’au lendemain matin.
Au bout de neuf mois, la jeune femme donna le jour à un fils, un bel enfant, bien conformé, et sans tête de poulain.
Au moment de partir pour faire baptiser l’enfant, le père dit à la jeune mère :
— « J’avais été condamné à porter une tête de poulain, jusqu’à ce qu’un enfant me fût né ; maintenant je vais être délivré, et, une fois mon fils baptisé, je serai en tout semblable aux
autres hommes. Mais, ne dites rien de ceci à qui que ce soit, jusqu’à ce que les cloches du baptême aient cessé de sonner ; si vous en dites la moindre chose, même à votre mère, je disparaîtrai à
l’instant, et vous ne me reverrez plus jamais ! »
Ayant fait cette recommandation, il partit avec le parrain et la marraine, pour faire baptiser son fils.
Bientôt la jeune mère entendit les cloches de son lit, et elle était tout heureuse.
Dans son impatience d’annoncer la bonne nouvelle à sa mère, qui était près de son lit, elle ne put attendre qu’elles eussent cessé de sonner et parla.
A DEMAIN POUR LA FIN DE CE CONTE