Réalité, rêve ou cauchemar ?
Certains et certaines se demandent si je n'ai pas perdu le fil de cette nouvelle écrite il y a quelques années. Eh bien non, pas du tout ! L'histoire n'est pas banale et complètement surréaliste. Le nombre de personnages clef se multiplient et pourtant, quand vous arriverez au dernier chapitre, vous allez dire comme notre ami le commissaire Bourrel, "Bon dieu, mais c'est bien sûr ....!"
- Cinquième partie -
Le reste de la journée fut partagé entre le sourire de John
et la béatitude de ce Loïc Caroff
dont je n’arrivais pas à décrocher le visage de mon esprit. Si bien qu’à la nuit tombée, je me demandais lequel des deux viendrait frapper à ma porte.
En fait, cette nuit-là, j’ai fait un rêve merveilleux et un horrible cauchemar car je les ai rencontré l’un et l’autre ...
... Quel bonheur de se réveiller à côté de John avec à l’esprit le souvenir de la nuit que nous venions de passer ensemble.
Il me semblait encore plus beau au petit matin, bien que son charme envoûtant qui émanait de la douceur de ce visage endormi me paralysait l’esprit.
J’avais commencé à préparer dans le plus grand silence le plateau du petit déjeuner que je comptais lui amener au lit, qu’il entra à demi vêtu dans la cuisine et tout en essayant à cloche-pied d’enfiler une basket.
Il me supplia de l’accompagner pour son jogging quotidien dans le parc situé à l’angle de la rue.
Le parc était vraiment splendide, c’est vraiment très agréable de courir au bord de l’étang accompagné du bruit que faisaient les canards, les cygnes et les oies
quand les enfants s’approchaient pour leur donner du pain.
Pour quelqu’un qui n’a pas l’habitude de faire du sport, je tiens à préciser que je me sentais en pleine forme et que j’avais ma foi une fort belle allure.
Il me semblait que j’aurais pu courir des heures sans pour autant me fatiguer. Nous allions de concert en chahutant comme des enfants,
il se mit à accélérer en me lançant comme défi d’arriver avant lui au grand chêne situé à 200 mètres.
Je venais à peine de le dépasser quand je l’entendis chuter et pousser un léger cri. Je suis revenue sur mes pas un peu amusée par le coté comique de la situation.
- « Je sais que je suis irrésistible, mais de là à te jeter à mes pieds, avoue que tu en fais un peu beaucoup. »
- « J’ai vraiment mal, ZAZA. » me dit-il en riant, son pied était sorti de sa chaussure.
- « Évidemment, encore heureux que tu as eu la présence d’esprit d’éviter de tomber dans l’étang, je n’aurais pas su quel cygne repêcher. »
- « Arrête, je t’en prie, c’est encore plus douloureux quand je ris »
Il avait vraiment l’air de souffrir et le « fameux Docteur » ZAZA se devait d’intervenir au plus vite. Après un court examen, je me suis contentée de diagnostiquer une belle entorse.
- « Essaie de marcher pour voir. »
Il avait du mal à poser le pied par terre, si bien que je dus l’aider pour nous rendre jusqu'à la voiture au bas de son appartement.
- « Je pense qu’il vaut mieux que je t’amène aux urgences pour y passer une radio. Attends-moi adossé à la voiture le temps que je monte chercher les clefs. »
Une demi-heure plus tard nous étions aux urgences l'hôpital de Galway.
La salle d’attente était pleine, il n’y avait pas une place assise de libre. Un homme d’une cinquantaine d’années qui avait le bras en écharpe insista pour que John prenne sa place.
Mon ventre grommela pour bien me rappeler que nous n’avions pas pris notre petit déjeuner.
- « Veux-tu que j’aille te chercher un café et une barre de céréales à un distributeur ? »
- « Tu es vraiment mignonne, merci. »
C’est pas possible, même en rêve je reste fâchée avec les hôpitaux, si bien que trois escaliers et deux ascenseurs plus tard je me suis enfin retrouvé en face du distributeur de boisson chaude.
J’entendais le souffle d’une personne qui s’approchait dans mon dos.
- « Bonjour. » me dit dans un français parfait et sans accent une voix d’homme un peu rauque.
- « Bonjour. » répondis-je machinalement en me retournant un café à la main.
Je dois vous avouer que je fus à deux doigts de lâcher le gobelet, la personne qui venait de me souhaiter une bonne journée n’était autre que Loïc Caroff.
- « Le temps est plutôt clément ce matin, je pense que nous allons avoir une belle journée. » me dit-il tranquillement.
- « Monsieur Caroff ? » dis-je d’une voix un peu hébétée.
- « Ah, je constate avec plaisir que vous vous souvenez de mon nom. Je n’ai malheureusement pas le plaisir de connaître le vôtre. »
- « Je m’appelle ZAZA. »
- « Puis-je vous appeler ZAZA, vous m’appellerez Loïc. »
- « Si..., si vous voulez. »
Je lui répondais machinalement toujours sous l’effet de la surprise, j’étais comme hypnotisée. John était complètement sorti de mon esprit.
Comme cela s’était produit au CHU des Pays de Morlaix,
sa forte personnalité avait réussi à le remplacer.
Près des distributeurs il y avait un petit salon aménagé pour les visiteurs.
- « J’ai envie de discuter un instant avec vous, ZAZA, vous voulez bien vous asseoir deux minutes afin que nous bavardions un peu, je n’ai pas tous les jours la chance de rencontrer une connaissance, en dehors des infirmières, à qui je fais peur le plus souvent. »
- « Pourquoi ont-elles peur de vous ? » Je m’étais assise dans un fauteuil tout en continuant la conversation.
- « Parce qu’à chaque fois que je les rejoins dans leurs rêves, c’est pour y être le personnage maléfique d’un horrifiant cauchemar, elles ne me voient jamais en bien. »
- « Chaque fois que vous les rejoignez dans leurs rêves ? Je ne comprends pas très bien ce que vous voulez dire. »
- « Voudriez-vous connaître la réponse du mystère de vos nuits, ZAZA ? »
- « Pardon, de quel mystère parlez-vous ? »
- « Aimeriez-vous que je vous révèle le secret du sommeil ?, voulez-vous que je vous confie la clef des songes ? »
- « Qu’est-ce que voulez-vous dire ? »
- « Voyez-vous, ZAZA, cela fait bientôt neuf ans que je rêve continuellement à longueur de journée, j’ai rencontré beaucoup de personnes et vu beaucoup de choses sans avoir eu à voyager. »
- « Je vous avoue que j’ai du mal à vous suivre »
- « Je vais vous aiguiller, en ce moment, bien que vous n’en ayez pas conscience, vous rêvez, si...si... je vous assure vous rêvez, et quand vous vous réveillerez, vous aurez sans doute l’impression d’avoir fait un cauchemar. Cependant vous avez du mal à me croire parce que le monde autour de nous vous semble bien réel et fort agréable, n’est-ce pas ? »
- « Évidemment qu’il est réel et qu’il est agréable, John m’attend en bas, il doit s’inquiéter, excusez-moi mais je dois vous quitter. Nous reprendrons cette conversation un autre jour. »
- « Pour l’instant, vous ne pouvez pas rejoindre John, ZAZA, vous devez continuer à me parler. »
J’aurais voulu m’en aller, mais j’avais l’impression que le poids de mon corps s’était subitement élevé j’étais plaqué sur mon fauteuil sans avoir la force de me lever. Une angoisse montait en moi à la vitesse de la lumière. Mais je repris rapidement de l’assurance et elle s’en alla aussi vite qu’elle était venue.
- « Que me voulez-vous exactement, monsieur Caroff ? »
- « Vous ouvrir les yeux ZAZA, uniquement vous ouvrir le yeux. »
- « Si je vous suis bien, vous prétendez qu’actuellement je suis en train de rêver, que vous deux, John, cet Hôpital, tout ce que je vois n’existe pas en réalité. »
- « Vous êtes bien en train de rêver ZAZA, cependant nos rêves sont plus complexes que vous ne le croyez, à part vous et moi qui ne sommes que le reflet de notre esprit tout le reste existe bel et bien, tout le reste est réel. »
- « Excusez-moi, j’essaye de comprendre, pour résumer : John existe, mais moi pas. »
- « Exactement, du moins en ce lieu et en cet instant. »
- « C’est ridicule, complètement ridicule, si je suis vraiment entrain de rêver, alors ni vous, ni moi, ni John ne sommes bien réels et si je ne rêve pas alors vous n’êtes qu’un fou car tout est réel. »
- « C’est ce que tout le monde croit ma jeune amie, mais les choses ne sont pas si simples que cela. En fait ZAZA, le monde est double. »
A demain pour la suite