CALEMBOURDIT
Sur la route des vins
Un jour le nommé Bertin s'en fut au champ.
En entrant dans le Chambertin, vinicole et lui dit « Beaune, Nuits ».
- « Tiens », fit-elle, « Tu es Maconnais. »
- « Oui », dit-il, » on pourrait Dijonnais ensemble. »
Et il se mit en Champagne pour lui plaire.
- « Viens », dit-il, « C'est moi qui Reims. »
Il l'emmena en Bordeaux, près d'un Moulin à Vent. « Je possède un Château-Margaux et une Ermitage » dit-il en l'embrassant sur l'Anjou.
Elle devint rouge, lui devint blanc. Ils se plurent d'oignon!
- « Ay-ay disait la petite – Tu Madère à la peau. »
- « Alors », dit-il d'une voix Graves, venez derrière Saumur.
- « Je suis à Vouvray », fit-elle en l'y suivant.
Mais il était Médoc en amour. C'est un Sauterne, pensa-t-elle, il est vin du Rhin.
Bref, elle en eut vite du Vieux Marc. Elle comprit qu'il n'était qu'un Pouilly, qui serrait le Corton de sa bourse.
« C'est un vieux Tokay » pensait-elle.
Elle le laissa pour un Beaujolais garçon, un nommé Aramon, qui n'avait rien d'un Muscadet mais qui la rendit très heureuse parce que c'était un bon Pinard… quoiqu'il la Cognac.
Jean Lec – 1935