A la mémoire de mes deux grands pères
et de tant d’autres……!
Par ce qu’il croit être un coup de génie tactique, Churchill pense modifier
la physionomie de la guerre: l’ouverture du Bosphore mettra hors de combat la Turquie, rétablira les relations directes entre la Russie et la Méditerranée contrôlée par les Alliés et donnera à
ces derniers la suprématie dans les Balkans.
Pour l’incorrigible optimiste qu’est Churchill, partisan d’actions spectaculaires qui lui vaudront la gloire, ce théâtre d’opération doit être l’occasion de faire basculer le cours de la guerre de façon
imprévue.
Il se sent une âme de
Bonaparte.
Mais sera-ce la bataille de la rade de Toulon (une victoire éclatante) ou de celle d’Aboukir (un désastre) ?
Aparté:
«On
signalera au passage que cette idée de «second front» en Europe Centrale sera de nouveau proposée par Churchill quelque… trente ans plus tard
puisque, à la Conférence de Téhéran (en décembre 1943), il proposera de nouveau à Staline et Roosevelt un débarquement allié
dans les Balkans !
Il s’agira, argumentera-t-il alors, de lancer une offensive là où personne n’attend (et pour cause), les Alliés afin de fondre comme l’éclair au cœur du Reich et obtenir une victoire rapide…
Prudent et rusé, Staline s’opposera à cette idée follement audacieuse mais peu compatible avec l’état des forces en présence.
Il optera pour un front occidental plus
large, situé loin d’une Europe Centrale où domine l’Armée Rouge, afin de prendre les Nazis en tenaille (et aussi de laisser aux Anglo-Américains le soin de s’y faire tuer seuls). Peu romantique
dans ses approches tactiques, Staline gagnera là la conviction du pragmatique FD Roosevelt. »
Mais revenons aux
Dardanelles où le projet de débarquement suscite déjà la prudence et la perplexité. L’amiral anglais Fischer y est opposé et avance des arguments techniques: une passe étroite, probablement garnie de mines flottantes et
fortement défendue par des canons manœuvrés par des artilleurs turcs encadrés par des officiers
allemands.
Pour y accéder, il faudra convoyer des troupes nombreuses, risquant les torpillages par les sous-marins allemands qui hantent les côtes turques.
Le ravitaillement et
l’intendance risquent de poser des problèmes tant les plages sont étroites: le matériel qui accompagnera les troupes aura des
difficultés à être débarqué.
Fischer n’est pas le seul: le Français Joffre voit d’un mauvais œil la perspective de voir ses réserves terrestres en hommes fondre.
Si l’on dégarnit le front européen au profit d’une opération exotique à la
réussite incertaine, ne risque-t-on pas de voir les Allemands percer les lignes champenoises pour fondre sur Paris?
Pour couronner le tout, des luttes politiques internes déchirent la stratégie
britanniques quant à l’opération des Dardanelles : si l’amirauté et le War Office y sont favorables, le Foreign Office, le Colonial office et l’Intelligence Service s’y
opposent, craignant que l’attaque de populations musulmanes ne provoque des révoltes en
Egypte et au Soudan.
Qu’importe! Confiant dans son intuition, Churchill impose son idée et dans un premier temps, l’opération sera maritime.
On ne lui accorde cependant que des bâtiments
anciens.
Pas question d’engager la fine fleur de la Royal Navy dans ce drôle de
projet.
Le 18 mars 1915, une flotte anglaise sous la direction du général Ian
Hamilton, appuyés de quelques bateaux français s’approche donc du détroit.
La suite
demain….
Bonne lecture