• Extraits des Contes Populaires de Basse Bretagne

     

    Bez’a zo brema pell-amzer’
    D’ar c’houlz m’ho devoa dennt ar ier.

    Il y a de cela bien longtemps,
    Quand les poules avaient des dents


    « Mendiant » Amedeo Modigliani

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    Un jour, un mendiant arriva chez un roi, et demanda l’aumône, au nom de Dieu...

    La fille du roi le remarqua, et elle dit à son père qu’elle voulait avoir ce mendiant-là pour mari.

    Le roi pensa d’abord que c’était pour plaisanter que sa fille parlait de la sorte. Mais, quand il vit qu’il n’en était rien et qu’elle parlait pour de bon et sérieusement, il lui dit :

    — « Il faut que vous ayez perdu la raison, ma fille, pour vouloir vous marier à un mendiant, la fille d’un roi comme vous l’êtes ! »
    — « Il n’y a pas à dire, mon père, il faut que je l’aie pour mari, ou je mourrai de douleur. »

    Le roi aimait sa fille par-dessus tout et faisait tout ce qu’elle voulait.

    Il lui dit donc qu’il la laisserait prendre le mendiant pour mari. Mais, le mendiant demanda que la princesse, ainsi que son père, sa mère et ses deux frères fussent baptisés, avant le mariage, car ils étaient tous païens.

    Ils furent tous baptisés, et le mendiant servit de parrain au prince aîné.

    On célébra alors les noces, et il y eut un grand festin.

    Quand les noces furent terminées, le mari dit :

    — « Je vais, à présent, retourner chez moi, avec ma femme. »

    Et il prit congé de son beau-père, de sa belle-mère et de tous les gens de la noce. Avant de partir, il dit encore aux deux jeunes princes ses beaux-frères :

    — « Quand vous voudrez faire visite à votre sœur, rendez-vous auprès d’un grand rocher qui se trouve dans le bois voisin, frappez dessus deux coups en croix avec cette baguette, et je viendrai à votre rencontre. »

    Et il leur donna une baguette blanche, et partit aussitôt avec sa femme, sans que personne sût où ils étaient allés.

    Quelque temps après ceci, le plus jeune des deux princes dit, un jour :
    — « Il faut que j’aille voir ma sœur, afin de savoir comment elle se trouve là où elle est. »

    Et il prit la baguette blanche donnée par son beau-frère et se rendit au bois. Quand il fut près du grand rocher, il frappa dessus deux coups en croix, et le rocher s’entrouvrit aussitôt, et il vit dessous son beau-frère, qui lui dit :

    — « Ah ! C’est toi, beau-frère chéri ? Je suis bien aise de te revoir ; mais, tu désires, sans doute, voir ta sœur aussi ? »
    — « Oui, je veux voir ma sœur, pour savoir comment elle se trouve. »
    — « Eh bien ! Suis-moi, et tu la verras. »
    — « Où ? »
    — « Dans mon palais ; descends et suis-moi. »

    Le jeune prince hésitait à descendre dans le trou noir qu’il voyait devant lui ; mais l’autre reprit :
    — « Viens avec moi, et sois sans crainte ; il ne t’arrivera pas de mal. »

    Il descendit dans le trou, et ils pénétrèrent tous les deux profondément sous la terre, jusqu’à ce qu’ils arrivèrent à un château magnifique. Dans ce château, le jeune prince vit sa sœur, dans une belle salle, magnifiquement vêtue et assise sur un siège d’or. Ils éprouvèrent une grande joie de se revoir.

    Le maître du château s’en alla, et les laissa tous les deux ensemble.

    — « Comment te trouves-tu ici, sœur chérie ? » demanda le frère à la sœur.
    — « Je me trouve bien, frère chéri ; tout ce que je peux souhaiter m’est accordé sur-le-champ. Il n’y a qu’une chose qui me déplaît ; mon mari ne reste pas avec moi. Tous les matins, il part en voyage, au lever du soleil, et, pendant toute la journée, je suis seule. »
    — « Où va-t-il donc de la sorte ? »
    — « Je ne sais pas, frère chéri, il ne me le dit pas. Je le lui demanderai, demain, pour voir. »
    — « Oui, demande-le-lui. »

    Le lendemain, le prince se leva de bon matin, et il parla de la sorte à son beau-frère :

    — « Je voudrais aller aussi avec vous, pour me promener, beau-frère ? »
    — « Je le veux bien, cher beau-frère. »

    Mais, à peine furent-ils sortis de la cour, que le maître du château demanda à son beau-frère :

    — « As-tu fermé la porte à clef sur ta sœur ? »
    — « Non vraiment », répondit-il.
    — « Eh ! bien, va fermer la porte, vite, et puis, reviens. »


    A DEMAIN POUR LA SUITE


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